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samedi 23 février 2013

Les Jeux de Jief,
le plaisir du jeu de société à partager

La pratique des jeux de société requiert certains prérequis. Le premier d'entre eux, le plus essentiel, est de se (re)trouver en société, justement. A plusieurs. Bien que certaines exceptions peuvent confirmer cette règle. Mais l’intérêt même de la pratique réside en la faculté que l'on puisse à plusieurs se retrouver autour d'un plateau, de meeples, de dés ou autres cartes, et partager un moment de franche rigolade et camaraderie. C'est ainsi. L’Homme est ce qu'il est, il n'est pas fait pour vivre en solitaire.

Jief l'a bien compris. Depuis quelques années déjà, ce ludophile organise nombre de soirées et après-midis centrées autour de sa passion. Cela se passe à Sorquainville, à quelques kilomètres de Fécamp. Pas si loin du Havre, finalement. Une quarantaine de minutes, si l'on est véhiculé. Avec l'ami +Christophe C., alias @Titloup76 - déjà auteur d'un article sur le sujet ce mois-ci - nous nous sommes rendus, le week-end dernier, à la trente-septième après-midi jeux "spéciale vacances" organisée.

Une ludothèque impressionnante y était présentée. A la grosse louche, une cinquantaine de jeux pouvait être abordée par les participants. Après chaque partie, Jief nous propose d'attribuer une note à la boîte. Le meilleur jeu remporte en fin d'année le Jief d'Or. N'écoutant que notre courage, et surtout notre féroce envie ludivore, nous nous sommes essayés à quatre jeux.

Indigo, ou comment récupérer ses joyaux par les tuyaux

Les règles d'Indigo sont d'une simplicité enfantine. Vous devez poser des tuiles formant des chemins de tuyaux, de sorte que les joyaux se trouvant sur le plateau parviennent jusqu'à vos portes. Oui, mais voilà : les tuiles sont piochées aléatoirement, et vos acolytes feront tout pour détourner ces flux nouvellement créés. A moins que la situation les arranges, auquel cas, des alliances éphémères pourront se créer. A la fin de la partie, le joueur ayant obtenu les joyaux de plus grandes valeurs gagne.

Très simple, mais extrêmement efficace, ce jeu abstrait donne tout de suite le ton. Les parties s’enchaînent et le plaisir s'installe. D'autant que les revirements de situation peuvent être nombreux, les amitiés du jour ne formant pas toujours celles du lendemain. 

Devenez le "Huggy les bons tuyaux" de ce jeu de joyaux.
Indigo, de Reiner Knizia, édité par Ravensburger, une petite trentaine d'euros dans toutes les bonnes échoppes. De 2 à 4 joueurs, à partir de 8 ans. Une trentaine de minutes par partie.

Meltdown 2020, dénucléarisation de meeples

Dans Meltdown 2020, votre mission - si toutefois vous l'acceptez - consiste au rapatriement de vos concitoyens, par tous les moyens possibles, dans les bases aériennes les plus proches, avant qu'une catastrophe nucléaire ravage la région. En effet, une des centrales du pays menace d'exploser, et les autres installations ne sont pas exemptes de défauts. Vous devez donc utiliser votre voiture, bus et hélicoptère pour permettre aux plus grand nombre de vos meeples de survivre.

Meltdown 2020 est un petit jeu sympathique alliant stratégie et ambiance apocalyptique. On peut cependant lui reprocher le manque d'interaction entre joueurs, chacun devant organiser son petit plan de sauvetage dans son coin, aucun moyen de gêner les autres dans leur progression.  

Aidez vos meeples à échapper à l'apocalypse nucléaire.
Meltdown 2020, de Corné Van Moorsel, édité par Cwali, une trentaine d'euros dans toutes les bonnes échoppes. De 1 à 5 joueurs, à partir de 8 ans. Une quarantaine de minutes par partie.

6 qui prend. Et parfois cher.

Le jeu de carte 6 qui prend est simple, et peut parfaitement être joué à l'apéritif, ou être emmené en vacances. Comme Christophe aime à la rappeler, c'est un jeu vache. Le principe est de poser toute ses cartes, tout en accumulant le moins de bovins possibles. Pour cela, vous devez disposer, à la suite d'une des quatre lignes de cartes se trouvant sur la table, une carte d'une valeur supérieure à la précédente. Mais attention, celui qui pose la sixième carte d'une ligne doit ramasser toutes les cartes de celles-ci, et accumuler les vaches qui vont avec.

6 qui prend est un petit jeu de carte comme je les aime. Stratégique, nombreuses possibilités de nuire aux autres. Des règles simples à comprendre, mais de la réflexion quand même. Bref, bien mieux que les petits chevaux !

Un jeu vache, meilleur que les petits chevaux !
6 qui prend, de Wolfgang Kramer, édité par Gigamic, une dizaine d'euros dans toutes les bonnes échoppes. De 2 à 10 joueurs, à partir de 10 ans. Une quinzaine de minutes par partie.

Die Maulwurf Company, à la recherche de la pelle d'or

Connu également sous le nom de la Compagnie des Taupes, Die Maulwurf Company s'adresse aux plus jeunes d’entre nous. Et pourtant, le mécanisme du jeu cache une véritable pépite tactique. Vous devez déplacer vos taupes au travers de plusieurs couches de plateaux successives afin de découvrir la pelle d'or. Mais; qu'on se le dise, à la fin, il ne restera plus qu'une seule taupe !

Vous devez déplacer vos taupes le long de chemin afin que celles-ci puisse rejoindre un trou et passer à l'étape suivante. Oui, mais voilà, vos mouvements sont limités : vous ne pouvez déplacer vos taupes que dans une seule direction à la fois, obligatoirement du nombre de cases indiquées par vos petites plaquettes piochées, et vous ne pouvez croiser d'autres taupes. Chaque joueur a donc un fort pouvoir de nuisance sur le jeu des autres. Tout pour me plaire, en somme.

Une pelle dorée se cache quelque part. Saurez-vous la trouver ?
Die Maulwurf Company, de Bertram Kaes et Virginia Charves, édité par Ravensburger, une trentaine d'euros dans les bonnes échoppes de l'Internet. De 2 à 4 joueurs, à partir de 6 ans. Une bonne trentaine de minutes par partie.

Liens utiles

Si cet article vous a donné envie de participer à la prochaine animation des Jeux de Jief, n'hésitez pas à consulter les liens suivants :

samedi 16 février 2013

Le Boka, le ti'lolo du Havre

Ceux d’entre vous qui ont déjà voyagé dans les Caraïbes, et plus particulièrement en Guadeloupe, le savent. Les endroits où l'on mange le mieux ne sont pas ces pièges à touristes où l'on vous promet un repas les pieds dans l'eau. Non. Certes, il y a le cadre. L'eau bleue azur, calme, chaude, protégée par une barrière de corail. Mais la nourriture y manque malheureusement d'originalité et racines, tant l'on veut attirer le chaland venu d'un autre continent. Non.

Là où l'on mange le mieux en Guadeloupe, c'est dans les ti'lolos. Mais kézako, les ti'lolos ? Ce sont généralement des petites baraques en bois, avec quelques tables et chaises dispersées ça et là, proposant de la nourriture locale, essentiellement des acras, de la chiquetaille de morue, ou encore des bokits. Des choses qui se mangent rapidement, mais que l'on ne saurait qualifier de fast-food. Nous sommes bien au-dessus. C'est l'idée reprise par le Boka, cette échoppe havraise ouverte depuis l'été dernier, non loin du Palais de Justice et de sa nouvelle station de tramway.

Six acras et leur purée de poivrons. Avec un rafraichissement. Et des couverts aussi.

J'entrais dans cette boutique par pur hasard, un jour où la météo n'était point expressive par sa clémence, ne sachant pas trop où me sustenter, le temps imparti m'étant compté. Cependant, je n'avais aucune envie de me rabattre sur un kebab ou un jambon-beurre-tomate. L'établissement propose, pour ceux qui souhaite manger sur le pouce, des bokits en diverses variantes. Dans mes souvenirs, ces sandwichs frits étaient essentiellement garnis de morue. Le Boka propose lui de le garnir selon vos envies : poulet, saucisse, jambon, viande hachée... Le cuisinier m'avoua d'ailleurs qu'il a fait évoluer la recette traditionnelle afin de l'adapter à nos goûts européens. A l'instar de ce que propose les restaurants turques, en somme.

J'optais plutôt pour le plat du jour et la formule consacrée, me promettant de revenir lors d'une journée plus ensoleillée pour déguster un bokit. Pour douze euros et cinquante centimes, vous obtenez une entrée, un plat et un dessert. Je pris une boisson en extra, un brevage particulier nommé Vita Malt. Une sorte de bière noire sans alcool, sucrée au goût de miel. Surprenant mais pas mauvais. Le Boka propose également de l’Ordinaire, une boisson guadeloupéenne aromatisée à l'anis. Je m'assis à l'une des rares tables libres, au coin de la pièce, côté fenêtre.Quelques plantes vertes tropicales pour la déco. De la musique zouk et des clips, diffusés par Trace TV. Le décor est planté.

Le service est rapide, le personnel souriant. Mes six acras arrivèrent, accompagnés d'une légère purée de poivrons rouges. Pas mal. On attend la suite. Le plat du jour. Curry de poulet accompagné de son riz. On le sent, la volaille a mijoté. Elle s'est parfaitement imprégnée du mélange épicé. Le riz, par contre, est d'une qualité moyenne. Bon, mais pas extraordinaire. Cela ne vient pas de la cuisson, mais du type de riz usité. Passable. Le serveur me proposa une sauce épicée, tout en me prévenant. Après y avoir goûter, oui, je peux l'affirmer : ça arrache. Pour le dessert, le restaurant propose des flans cocos, mais aussi des tartes au Daim ou au Toblerone. Bon, là, ma gourmandise de bas étage l'emporta, et j'optais pour cette dernière. Un choix que j'assume sans regretter. Assurément.

Si vous disposez de peu de temps pour vous restaurer, le Boka est une excellente alternative à ce qui se pratique habituellement. Le service y est rapide, la formule plat du jour est servie en une vingtaine de minutes. Les aliments sont cuisinés et préparés sous vos yeux, et les ingrédients sont globalement de premier choix. L'établissement propose ici un compromis entre restauration guadeloupéenne traditionnelle et fast-food à l'européenne. L'alternative est intéressante, mais pour des repas plus élaborés, préférez tout de même les traiteurs antillais classiques - il y en a un très bon, par exemple, rue du Maréchal Joffre à proximité du Rond Point. 

Enfin, on peu regretter certains extras pratiqués par l'établissement : les desserts hors formules ne sont pas biens indiqués, supplément d'un euro pour la sauce piquante... A tester tout de même, au moins pour l'exotisme du repas et la bonne humeur du personnel.

Tiens, le verre est vide ! C'est que le curry est bon !
Le Boka, tramway Palais de Justice, 108 Rue Jules Siegfried, 76600 Le Havre - Ouvert le midi du lundi au vendredi, et le soir du mercredi au samedi.

samedi 9 février 2013

Royal Revolt !
Que la bataille pour le royaume commence !

Il est dans le domaine ludique - jeux de plateau, de cartes, vidéo... - un thème récurrent et universel que celui de la chevalerie. Qui, en effet, n'a jamais rêvé d'aller secourir une princesse en détresse dans un univers médiéval fantasy, tel Mario... euh... Romualdo allant rejoindre la belle et néanmoins intrépide Fantagaro dans la Caverne de la Rose d'Or ? Qui n'a jamais rêvé de se faire acclamer par toute un peuple en entrant sur un terrain de joute, We Will Rock You de Queen retentissant dans le stade, tel Heath Ledger dans Chevalier ?

Ne vous cachez pas, je vois les étoiles scintiller dans vos yeux. J'ai une bonne nouvelle pour vous. Royal Revolt ! c'est un peu de tout cela à la fois, saupoudré d'épiques batailles à la Seigneurs des Anneaux. Car, oui, ce petit jeu, c'est un peu le Retour du Roi. Recrutez de fidèles soldats, et partez la reconquête de votre couronne !

L'écran titre du jeu sur un Nexus 4. Oui. Un Nexus 4.
L'histoire de Royal Revolt ! est simple, mais plutôt efficace. Un an avant les événements du jeu, votre père, le Roi, vous envoi dans un pensionnat pour jeunes aristocrates gâtés et maladroits. Vous y apprenez l'art de la guerre et de la politique, devenant un fieffé souverain. Malheureusement, votre père décède, et lorsque vous revenez en votre royaume, diplôme de Roi en poche, vos oncles et tantes vous écartent du trône. Mais vous avez décidé de ne pas vous laisser faire. Vous êtes désormais assez grand et mature pour gérer les affaires de votre royaume comme vous l’entendez. Heureusement, une partie de votre peuple vous est resté loyal et est paré à vous prêter main forte dans votre quête de pouvoir. Que la bataille pour le royaume commence !

La mécanique du jeu est simple à comprendre. La progression est très évolutive, les premiers niveau n'étant que des tutoriels vous permettant de vous familiariser avec les rouages du commandement de l'armée. Royal Revolt ! se situe entre un A-RPG, un hack'n'slash à la Diablo et un jeu de stratégie en temps réel. Le résultat se rapproche d'un tower defense inversé, ou vous ne jouez pas le rôle du défenseur devant ralentir la progression d'unités ennemis en construisant des tourelles sur leur chemin, mais, au contraire, d'un attaquant devant détruire les unités disposées par votre ennemi afin de parvenir jusqu'au porte de son château, et le débusquer.

Votre rôle de leader charismatique vous confère toute sorte de pouvoir, comme soigner vos alliés, lancer des boules de feu pour brûler des barricades en bois, donner des coup de marteau pour détruire les murs en pierres, empoisonner vos ennemis... Mais voilà. Vous n'êtes limité qu'à deux pouvoirs actifs. A vous de choisir quelles capacités utiliser durant la partie afin de bâtir la meilleure stratégie possible. Ces pouvoirs peuvent être améliorés, moyennant quelques pièces d'or accumulées durant vos divers pillages.

Il en va de même pour les unités que vous employez. Vous commencerez votre partie avec de simples soldats, tout droit sortis des champs avoisinants, munis de fourches pour attaquer vos ennemis. Viendront ensuite se joindre des archers, des mages, puis des balistes. Chacune de ces unités évolue au gré de l'or que vous y investissez, les soldats devenant chevaliers, les archers des rangers, les balistes des canons... Enfin, de la même manière, vous pouvez améliorer votre propre équipement, vous permettant ainsi d'améliorer votre charisme, votre défense, et votre attaque.

Il parait qu'il y a une grosse teuf dans ce château. On y va ?
Lorsque vous débutez un assaut, vous êtes seul sur le champ de bataille. Une petite jauge bleu en bas de votre écran - la jauge de charisme - vous indique à quel moment vous pouvez appeler à votre rescousse une unité supplémentaire. Cela va très vite : dès le début vous pouvez ainsi convoquer trois ou quatre soldats, voire un ou deux archers. La jauge se remplie régulièrement, aussi, il vous faut appeler des unités environ toutes les deux à trois secondes. Le but est de se retrouver avec le plus d'unités possibles devant les portes du château, afin que son occupant capitule le plus rapidement possible.

D'un point de vu technique, le jeu est extrêmement bien réalisé. Les graphismes, colorés et enfantins, sont tout de même d'une complexité impressionnante pour un jeu sur smartphone, mélangeant habilement 3D et textures d'une finesse remarquable. Le jeu est très agréable à jouer, la difficulté est très bien dosée. Si certains niveaux vous paraîtront facile, d'autres constitueront de vrais défis. La durée de vie du jeu est fortement allongée par la rejouabilité de ses niveaux. Vous aurez en effet plusieurs prétextes pour recommencer un assaut : obtenir les trois étoiles, gagner plus de pièces d'or, battre de nouveaux records...

Le jeu est gratuit. Il a donc des fonctionnalités d'in-app purchase, matérialisées par une boutique. Cependant, vous ne serez pas harcelé de pubs intempestives, ni de lourdes incitations à délier votre bourse à euros pour acheter des pièces d'or. De plus, il n'est pas très compliqué de se fournir en précieux métal jaune. En effet, des défis journaliers vous rapportent bon nombre de piécettes. De plus, si vous lancez l'application au moins une fois par jour, vous gagnerez d'autres pièces d'or. Enfin, le partage de vos scores sur le réseau social Facebook vous permet de gagner dix pour cent d'or supplémentaire. A mon sens, l'achat d'or n'est pas à conseiller, l'intérêt et la durée de vie du jeu s'en trouveraient réduits.


Royal Revolt ! est un excellent jeu, disponible gratuitement tant pour iOS  qu'Android et qui vous procurera des heures de plaisir vidéoludique. Prenez votre épée, travaillez votre charisme, amassez un maximum de pièces d'or et entrainez votre armée pour reconquérir votre trône !
 
Non, ce n'est pas la route des château de la Loire.
Royal Revolt ! est édité par Flare Games. Disponible gratuitement sur le Google Play Store et l'Apple App Store.

samedi 2 février 2013

Shadows over Camelot, quand les chevaliers jouent aux cartes autour d'une table ronde

Comme j'aime à le rappeler, l'hiver est la saison où les nuits sont les plus longues. Accessoirement les plus froides, aussi. Ces longues nuits nous empêchent de profiter pleinement du jour. C'est un fait. Que dis-je, un lieu commun. Heureusement, certaines personnes bien attentionnées passent leur temps à inventer des moyens de passer le temps. Les auteurs de jeux de sociétés font partie de ces gens biens.

Et parmi ces gens biens, il y a Serge Laget et Bruno Cathala. A eux deux, plus d'une cinquantaine de jeux à leur actif. Dans le monde ludophile français, on ne les présente plus. Ils sont, entre autre, co-auteurs du célèbre jeu coopératif Les Chevaliers de la Table Ronde, édité en 2005 par Days of Wonder. Sept années plus tard, les deux compères remettent le couvert. Toujours dans le même univers, mais dans un jeu de cartes. 

Dans Shadows over Camelot, les ombres planent désormais sur les enfants des chevaliers originels. On raconte qu'aux quatre coins du royaume de nombreux dangers resurgissent. Les pictes et les saxons veulent étendre leur territoire, le dragon a brûlé une partie de la forêt de Brocéliande, le Graal n'a toujours pas été trouvé, et l'épée Excalibur a malencontreusement été égarée... Un magnifique héritage que l'on vous a légué là. Le décor est planté.

Des cartes carrées, des cartes rectangulaires... Bref. Un jeu de cartes.
Tout comme son aîné, Shadows over Camelot repose sur la coopération entre les joueurs. Au début de la partie, chacun tire une carte de rôle. Jusque là, ce n'est pas compliqué. Soit vous êtes un chevalier régulier, prêt à tout pour défendre votre royaume, soit vous êtes un avide félon dont le but n'est autre que de plonger la cité de Camelot dans les ténèbres. Le félon est d'ordinaire solitaire, à l'exception des parties à 7 joueurs ou deux félons peuvent composer le tour de table. Naturellement, à par lui-même, personne ne sait qui est ce traître, ce qui est d'autant plus amusant. Par ailleurs, il se peut qu'il n'y ait aucun félon durant une partie. Certaines cartes peuvent aussi faire changer de rôle aux chevaliers en cours de jeu, ce qui ne manque pas de provoquer de cocasses situations.

Une fois les rôles distribués, l'on place la pioche, composée de cartes carrées, au milieu de la table. Celle-ci représente les rumeurs. Les chevaliers ont, à tour de rôle, la possibilité d'effectuer une action parmi trois possible : écouter les rumeurs, partir en quête, ou accuser un autre joueur de félonie. Le but final étant de protéger son royaume contre toutes les menaces. Cet objectif est par ailleurs matérialisé par l'obtention de sept épées blanches. A l'inverse, la défaite du groupe et la victoire du félon est représentée par l'obtention d'épées noires. Sept épées noires, et il en fini du royaume de Camelot.

Toute la complexité du jeu consiste en l'attente du bon moment pour partir en quête. Pour cela, les chevaliers choisiront la plupart du temps d'écouter les rumeurs. Le joueur prend alors la première carte de la pioche des rumeurs et la pose à côté, face découverte. Le joueur suivant, qui piochera également une carte, la posera au-dessus de la précédente, masquant ainsi ses symboles, et ainsi de suite. Les cartes principales comportent diverses informations : le type de quête - empêcher une invasion de saxons, partir à la recherche du Graal... - le nombre d'épées pouvant être gagnées ou perdues, ainsi que la valeur de la rumeur. 

Chevalier ou félon ? De quel côté de la Force basculerez vous ?
Lorsqu'un joueur décide de partir en quête, il doit alors trier les cartes et additionner les différentes valeurs de chacune des quêtes. La quête dont l'une des cartes se trouvait sur le dessus de la défausse à rumeurs constitue la quête principale : si le total de ses points se trouve être de 11, 12 ou 13, la quête est réussie et le groupe remporte le nombre d'épées blanches allouées. Dans le cas contraire, les épées seront noire. Les autres quêtes, considérées comme secondaires, ne rapportent aucune épée blanche, mais compte pour défaite si leur total dépasse 14.

Vous l'aurez compris, ce jeu s'adresse à des personnes habiles en calcul mental. Et encore, je ne vous ai pas révélé toute la difficulté de cette boîte. En effet, certaines cartes de quête ont leur valeur remplacée par un point d'interrogation. D'une addition, nous passons alors à une équation, chacune de ces cartes se multipliant pour le résultat final. Par exemple, vous souhaitez partir à la chasse aux pictes et vous disposez d'une carte valorisée à deux points et trois cartes marquées d'un point d'interrogation. Cela vous donne la formule suivante : 2+3x3 (le nombre de cartes) = 11. Oui les mathématiques sont cruelles. A cela, rajoutez les cartes Morgane, Merlin et consorts, qui viennent chacun leur tour perturber la partie, et vous aurez un jeu d'une grande complexité.

Je ne conseillerais donc pas Shadows over Camelot à tout le monde. Il faut aimer jouer avec les chiffres, avec les inconnues. Ou alors, il faut être le félon. Ce dernier à en effet le rôle le plus intéressant à mon sens, semer le doute dans la tête des autres. L'univers sert ici d'alibi à un jeu de réflexion et de mémoire, où l'ambiance, créée par les joueurs eux-même, est primordiale. De plus, même si une partie peut être jouée à deux - voire tout seul - le jeu à sept est de loin le plus intéressant. Si vous souhaitez vous lancer dans Shadows over Camelot, choisissez donc bien votre groupe d'amis.

Une partie à deux qui débute bien mal... Enfin, pas pour le félon.
Shadows over Camelot, de Serge Laget et Bruno Cathala, édité par Days of Wonder, environ 20 euros dans toutes les bonnes échoppes. De 1 à 7 joueurs, à partir de 8 ans. Une vingtaine de minutes par partie.